Ce que les voix nationalistes qui gagnent en vigueur dans notre beau pays redoutaient est arrivé : on n’est plus chez nous ! En France, un maire et la quasi-totalité d’une population a décidé d’en finir avec les lois républicaines qui maintiennent sur l’ensemble du territoire la notion de nation, la notion de France. A Nice, monsieur Estrosi s’asseoit sur la justice française et va chasser avec toute la virilité dont il est capable les Gens du voyage, désignés comme des Roms, qui ont le malheur de revendiquer les droits que la législation a prévu à leur égard.
A Nice, on n’est plus en France. On est ailleurs, dans un pays étranger et étrange où la moyenne d’âge avoisine les quatre-vingts ans et sur lequel monsieur le maire règne comme un prince monégasque, les dorures et Grace Kelly en moins, mais avec le même sens de l’opérette. Christian Estrosi se veut le chantre de la « droite populaire », un mouvement qui proclame que le FN a raison sur tous les points mais qu’il convient de voter UMP tout de même. Ancien président de Conseil Général, plusieurs fois ministre et aujourd’hui maire d’une des villes les plus cossues de France, il ne fait aucun doute qu’il est en mesure de se revendiquer du peuple et d’en connaître les aspirations sur le bout des doigts.
Nice a fait sécession. Nice réclame le rétablissement de la peine de mort. Nice proteste contre le PACS et Nice s’étouffe en entendant parler de mariage gay. Nice déteste le progrès, le futur, le présent, et en général tout ce qui date d’après 1950. A l’exception de son maire bien-aimé qui, erreur de jeunesse, est né en 1955. Mais monsieur Estrosi étant un clône parfait du regretté Jacques Médecin, l’homme politique le plus intègre que le pays ait jamais connu, on lui pardonnera de frôler l’appartenance à la génération des soixante-huitards.
Nice a depuis peu suscité l’émoi en France, ce pays voisin qu’elle hésite à reconnaître. Un bijoutier tout ce qu’il y a de plus normal s’y est fait agresser par un agresseur tout ce qu’il y a de plus normal également. Dans un pays et dans une ville où les riches sont très riches et les pauvres sont très pauvres, les pauvres agressent les riches. Ce n’est pas une excuse, c’est une réalité sociologique. Et dans un pays ou dans une ville où messieurs les ministres et monsieur le maire font preuve de plus en plus de violence, les agresseurs font preuve de plus en plus de violence aussi. C’est con, c’est vrai, mais si les bandits étaient intelligents, ça se saurait.
En l’occurrence, voyant ses agresseurs s’enfuir avec son bel argent, le bijoutier n’a écouté que son courage, s’est jeté dans la rue à leur poursuite, armé comme il se doit, et a tiré dans le dos de l’un des voyous. Qui en est mort. Justice a donc été rendue au pays de Nice, selon les critères de monsieur Estrosi. Depuis, le bijoutier de Nice, dont on évite de prononcer le nom de peur de remettre en cause son statut de bon Français bien de chez nous, a expliqué qu’il ne visait pas le jeune, mais le scooter. C’est bien connu : tirez dans les pneus des bandits, et ils vous rendront votre argent avec des excuses.
Pour autant, si l’on se souvient de l’affaire du scooter volé de Jean Sarkozy, on peut presque être content pour le brave bijouter que sa balle n’ait effectivement pas atteint le véhicule en question. C’est que la Police Française ne plaisante pas avec les scooters. Au far-west, on pendait les voleurs de chevaux. Dans la Sarkozie, dont Nice est une dépendance, les deux-roues bénéficient de toute l’attention des forces de l’ordre. Avec un maire comme Estrosi et sa brillante carrière motocycliste, qui pourrait en douter ?
Toujours est-il que la justice, incarnée par la figure satanique et basanée de Christiane Taubira, celle qui en veut aux bonnes moeurs et à l’homme blanc, selon Frigide Barjot et Eric Zemmour, celle qui fait pleurer le petit Jésus et les nostalgiques de Rachida Dati, cette Justice aux ordres honteux de la dictature socialiste que les partisans de la dictature papale ne cessent de dénoncer sur Internet, décide d’aller chercher des poux dans la tête du brave bijoutier qui n’a fait que défendre son droit à tirer dans le dos des gens qui lui ont fait du mal.
Et voici que toute la France se prend de solidarité pour la nation Nice. Les voilà plus d’un million à « liker » la page Facebook de défense au bijoutier de Nice. Le défendre pourquoi ? A t-il été condamné ? A t-on entendu des membres du gouvernement remettre en cause sa présomption d’innocence, ou anticiper sur l’action de la justice, comme le fit en son temps un certain monsieur Sarkozy à l’encontre d’un certain monsieur Colonna ?
Est-il si choquant qu’un homme qui en a tué un autre soit mis en examen ? Que la police et la justice éprouvent le besoin de tirer l’affaire au clair, d’étudier les éléments et de juger si l’acte était nécessaire, ou s’il est répréhensible ? A Nice et dans le coeur de millions de Français, la réponse est oui : si je me fais agresser, j’ai le droit de tuer mon agresseur, même en-dehors de toute menace, même en lui tirant dans le dos.
« Y en a qui vont jusqu’à flinguer pour sauver leur autoradio »…
Après tout, les policiers niçois ne peuvent pas être partout, on ne peut donc que remercier ce brave citoyen de s’être chargé d’une bavure à leur place. Et applaudir les commentaires célébrant la victoire de l’honnête contre le malfrat, et de réclamer que la riposte se généralise, que les bijoutiers s’arment et dégomment, nantis du 000 de vigueur, toute personne susceptibles de les dérober. Car c’est ainsi : les gens honnêtes devraient avoir le droit de tuer. A quoi bon être honnête si cela ne nous permet pas de violer la loi ?
On suggèrera donc aux amateurs de breloque de penser à entrer chez leur bijoutier les mains en l’air, la ceinture bien en évidence, pour que du bout de son canon de fusil, le commerçant honnête puisse juger de leur degré de bonnes intentions. Et si par malheur le coup part tout seul ? Bah, aux Etats-Unis, on acquitte pour moins que cela. Il y aura toujours deux millions de bonnes âmes pour liker le commerçant victime de son Parkinson naissant. Tout ce qui compte, c’est que les voyous soient mis hors d’état de nuire par une foule de gens honnêtes armée jusqu’aux dents, se substituant à la police, et décidant avec l’appui de la population qu’elle peut tuer quand elle le désire, et faire justice ou vengeance elle-même.
Et il se trouve encore, dans notre faiblarde démocratie républicaine, des lâches, des tarlouzes, pour remettre cela en cause ? Pour prétendre qu’aussi inexcusable soit une agression, elle ne peut justifier un meurtre, et qu’en absence de légitime défense, la mort d’un bandit ne peut être considérée comme un acte de justice ? Quelle tristesse. Darnand doit se retourner dans sa tombe. Heureusement que Nice, pays des Droits de l’Homme et du Bijoutier, donne à notre France l’exemple à suivre. Ou, pardon, à liker.
Publié à l’origine sur le blog nevertrust.over-blog.com